Le Direktor - Lars Von Trier
Pour ce film je propose d'abord mon point de vue, puis celui de "spécialistes"...
Par ce film, Lars prouve qu'il est un immense réalisateur, un artiste dans l'âme, un génie... être capable de revenir au film dogme après le méga succès de Dancer In The Dark, il fallait en avoir le courage, l'envie et les moyens...
c'est surtout ce dernier point qui m'intéresse... les moyens, Lars, il les a... Faire un film, très simple, dénué de toute considération commerciale, de prouesse technique et autre, c'est ça être créatif... et c'est une réussite!!
l'histoire:
Le propriétaire d'une société d'informatique décide de vendre son entreprise. Mais il y a un petit problème. A l'époque ou il a créé sa société, il s'est inventé un directeur fictif derrière qui s'abriter pour prendre les décisions impopulaires. Comme les acheteurs potentiels insistent pour conclure le deal avec le directeur en personne, le propriétaire décide d'embaucher un acteur au chômage pour jouer le rôle du directeur, habité par le Stanislasski local à savoir un certain Gambini.
Sur fond de "sagas" et domination danoise...
Premier genre littéraire traditionnel, la poésie, généralement héroïque, laissa place aux sagas de la fin du XIIe à la fin du XIIIe siècle. Ces récits épiques et dramatiques décrivaient l'arrivée des premiers colons, leurs amours, leurs disputes et les événements historiques du pays. Elles ont ainsi captivé des familles entières pendant les longues soirées d'hiver et ont permis aux Islandais de se constituer un patrimoine culturel commun.
À la fin du XIVe siècle, l'Islande passa sous domination danoise. Le conflit opposant l'Église et l'État déboucha sur la Réforme en 1550 et le Danemark imposa la doctrine luthérienne au pays. Pendant deux siècles, celui-ci fut soumis à l'oppression danoise, livré aux pirates du monde entier et en proie à d'incessantes catastrophes naturelles. L'étau danois se desserra en 1874. L'Islande élabora une Constitution et fut autorisée à s'administrer. En 1918, elle devint un État indépendant au sein du royaume du Danemark, qui continuait à gérer la défense et la politique étrangère. Lorsque l'Allemagne envahit le Danemark en 1940, l'Islande estima que le royaume n'était plus en mesure de s'occuper de ses affaires et réclama son indépendance complète. Elle l'obtint le 17 juin 1944.
Techniquement, même combat!! plans quasi tourné-monté, des raccords pas raccords du tout, pas de doublage son, pas de musique, de la pure tradition dogmatique, initiée il faut le rappeler par Lars lui même et qu'à l'évidence il maitrise à la perfection... Et pour peaufiner son jeu technique, il décide d'innover encore avec le procédé Automavision... Procédé cinématographique de prise de vue (et de son) développé dans l'intention de réduire l'influence humaine sur l'œuvre en convoquant l'arbitraire, pour obtenir une surface dépourvue d'idéologie, et détachée des habitudes pratiques et esthétiques. Après une mise en place artistiquement optimale de la caméra (décidée par le directeur de la photographie), un ordinateur programmé spécialement (avec possibilités de choix réduites) est chargé de décider quels paramètres changer : inclinaison, panoramique, focale, diaphragme, positionnement horizontal et vertical (pour le son il existe des paramètres équivalents, modifiés de la même manière après les mises en place de l'ingénieur du son). Le metteur en scène/directeur de la photo/ingénieur du son a la possibilité, après ce choix aléatoire des paramètres, de ne pas les conserver pour la prise de vue. Dans ce cas un autre paramètre est effectué d'après la formule Automavision après l'arrêt de la caméra. Pour tirer au final le maximum de ces décisions partiellement aléatoires concernant le cadrage et le son, une autre règle stipule qu'il ne doit pas y avoir d'autres manipulations à l'exception d'un montage élémentaire, simple bout à bout des scènes, dans l'ordre pré établi, image et son synchroniquement verrouillés. Il n'est pas permis de faire des changements de luminosité ou des manipulations de l'image ou du son, qui doivent être reportés tels quels sur la copie finale. Dans le cas de "Le Direktør" une règle supplémentaire interdisait l'utilisation de lumière artificielle au tournage, à l'exception des éclairages en place dans le décor naturel utilisé. Toutes les scènes de "Le Direktør" sont tournées d'après les principes d'Automavision exceptées quatre scènes courtes avec les commentaires du metteur en scène. Car Lars est en voix off sur certaines scènes...
Le spectateur néophyte pourrait se demander pourquoi ce film est classé dans la catégorie des comédies, vu que les scènes hilares ne se bousculent pas au portillon... et pourtant, c'est bien d'une comédie dont il s'agit... scènes de quiproquo, situations absurdes, dialogues de sourds, tous les ingrédients d'un humour corrosif et fin digne du cinéma nordique sont bien présents... Je savais, que ce film me plairait, c'est chose faite...
Bio express:Né en 1956 et diplômé de la Danish Film School en 1983, il est sans aucun doute le réalisateur qui a le plus contribué au renouveau du film danois et a eu un grand impact sur la nouvelle génération des années 90, entre autre grâce à son rôle essentiel dans Dogme 95. Son œuvre se situe entre films d’avant-gardes et explorations innovatrices de certains genres du cinéma classique. Lars von Trier s’est fait connaître grâce à la TRILOGIE EUROPEENNE.
Après le tournage d’Europa, Lars von Trier prend conscience avec The Kingdom I (1994) et Kingdom II (1997) que la technique touche moins le public que l’histoire et les personnages. Ce sont les prémices qui le conduiront à rédiger le concept Dogma en 1995. La série est principalement filmée avec une caméra tenue en main, ignorant de ce fait les règles habituelles en matière d’éclairage et de continuité en montage.
Sa seconde trilogie THE GOLDENHEART TRILOGY
1996 Breaking The Waves (Grand Prix au festival de Cannes 1996)
1998 The Idiots (Dogma)
2000 Dancer In The Dark (Palme d’Or au festival de Cannes 2000)
Sa troisième trilogie AMERICA – THE LAND OF OPPORTUNITIES.
2003 Dogville, le premier film de cette trilogie
2005 Manderlay se consacre au scénario d'une série danoise : Klovn.
2007 Le Direktor.
Avis "pros":
Le réalisateur l’annonce lui-même dès le début du film : il d’agit d’un film modeste, sans ambition particulière. Un film qui s’annonce donc, à priori, comme mineur dans l’œuvre du cinéaste danois. Il s’agit également de sa première véritable comédie, tournée entre le second (Manderlay) et le troisième opus de sa trilogie américaine.
Lars Von Trier ne se creuse pas beaucoup dans le choix des procédés comiques. Car si l’idée de départ est originale avec cet acteur qui se prend trop au sérieux payé pour prendre la place d’un directeur imaginaire, le film tombe progressivement dans la facilité. L’humour décalé, absurde et les détails farfelus des différents personnages de cette entreprise réussissent à rendre le film plaisant à regarder. Le rire est discret, léger et fréquent et si certains ressorts comiques manquent de singularité, ce n’est pas ce qui peut agacer le plus. En dehors du fait que le film est tout de même rapidement oublié, la prétention du film irrite. Notamment, les interventions, quelque peu narcissique, du réalisateur en cours de film qui n’apportent rien que ce soit à l’histoire ou en tant que ressort comique.
Finalement, Lars Von Trier nous offre une comédie mineure, légère, au ton décalé, un film qui, toutefois, ne laisse pas de traces.
Par Cédric Jager
Lars Von Trier réalise une comédie, mais évidemment pas comme les autres. Vous vous en doutez, la bouffonnerie n'est pas son registre. The Direktor allie donc une fantaisie douce-amère au plus grand sérieux. Jugez-en plutôt : une petite société danoise est en passe d'être vendue à un acheteur islandais (caricature de Viking rustre, bourru et arrogant). Seul hic à l'affaire, le contrat doit être signé par… un homme qui n'existe pas ! Le Grand Patron n'est qu'un écran de fumée, un personnage fictif, que le gérant de la boîte a inventé pour faire croire à ses employés que les décisions venaient d'en haut, d'un dirigeant anonyme implanté aux Etats-Unis, contrôlant son business à distance. Astuce pratique en certaines circonstances, mais en l'occurrence redoutablement piégeuse. En bonne logique, l'entrepreneur facétieux va donc engager un comédien, pour jouer le rôle du mystérieux "Directeur de tout", que personne n'a jamais vu.
Le cinéaste danois signe en filigrane une double parodie : du monde cynique et cruel de l'entreprise, et du caractère intrinsèquement mensonger du cinéma, où il interroge notamment le rôle de l'acteur et celui de la mise en scène. Qui dirige qui ? Quelle peut être la place laissée à l'improvisation ? Comment maîtriser des paramètres aléatoires ? En l'occurrence, se glisser dans la peau d'un personnage dont on ne sait rien, tout en paraissant crédible. Le faux Direktor se revendique d'un certain Gambini, prétendu théoricien de l'actorat aux préceptes radicaux et pour le moins singuliers (en réalité, Lars Von Trier fait référence à Ibsen). Comme toujours, le réalisateur joint le fond et la forme et expérimente un nouveau dispositif filmique : l'Automavision, qui consiste en un cadrage assisté par ordinateur. Les plans se règlent automatiquement, ce qui donne, au montage, cette impression syncopée de rationalité hasardeuse.
Lars Von Trier s'adonne à ce nouvel essayisme avec la clairvoyance qu'on lui connaît, et nous livre un film apparemment sans pilote, qui repose entièrement sur un quiproquo. Le comique de situation est teinté d'une ironie assez savoureuse, et il faut saluer la prestation étonnante de Jens Albinus, qui interprète de façon inattendue la doublure du "boss fantôme" : tout en gaucherie évaporée, quelque part entre "je gère tout" et "je ne maîtrise rien". Tantôt énigmatique et séducteur, tantôt pâle usurpateur, en tout cas figure impassible et déroutante pour des salariés perplexes, qui ne savent plus trop à quel patron se vouer... Vous avez le droit de préférer Von Trier dans de plus noires inspirations, mais cette comédie de rôle, à défaut d'être foncièrement drôle, vaut le coup d'œil, ne serait-ce que pour son originalité.
par Laurence Berger
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